« Un éleveur qui va mal doit être aidé par sa chambre d’agriculture, la MSA, son centre de gestion, sa banque…
Ce n’est pas un client, c’est un agriculteur en détresse », rappelle David Rivière, éleveur de charolaises à Virieu-sur-Bourbre, en Isère.« C’est arrivé encore la semaine dernière, dans la commune d’à-côté. Un jeune motivé, adhérent à la Cuma… Il avait 23 ans, et il s’est suicidé. Nous n’aurions jamais pensé qu’il passe à l’acte, parce que lui, il n’en avait jamais parlé. D’ailleurs, un agriculteur qui dit qu’il veut se suicider, c’est un appel à l’aide. Celui qui veut vraiment le faire, il ne le dit à personne, il le fait », explique David Rivière.
Cet éleveur de charolaises de 39 ans, élu, depuis un an, au sein de la chambre d’agriculture de l’Isère, a souhaité s’engager, explique-t-il « pour faire bouger les choses. Mon but est de défendre l’élevage et les éleveurs parce que le malaise pour la plupart va grandissant. » Entre les enjeux fonciers, avec l’agrandissement des banlieues lyonnaise et grenobloise, les problèmes de rémunération, ceux liés au loup, les critiques récurrentes… « ça fait beaucoup, beaucoup de pression. Mais des solutions, il y en a. »
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Donner l’alerte au premier décrochage
David Rivière estime que « le malaise des agriculteurs peut être pris à bras-le-corps. Le plus souvent, il suffit de peu de choses pour raccrocher un agriculteur à son métier, à la vie… À condition que tout le monde s’y mette. » Les associations, les banques, les experts-comptables, la MSA, « tout le monde doit donner l’alerte au moindre décrochage d’un agriculteur qu’il soit de la FNSEA, de la Confédération paysanne ou de la Coordination rurale. Ce n’est pas un client, ce n’est pas adhérent. C’est un agriculteur en détresse. »
David Rivière a souhaité intégrer la cellule « bien-être animal » de la chambre d’agriculture. Et il s’aperçoit « qu’à travers le bien-être animal, je travaille surtout sur la détresse humaine. Quand un éleveur ne met plus les boucles à ses animaux, par exemple, c’est souvent qu’il est en surmenage. C’est un indicateur. Alors on n’est pas toujours formé pour l’aider. Mais il peut parfois suffir d’une assistance technique d’une demi-journée pour remettre un peu d’ordre, et éviter l’intervention ultime des services de l’État. Nous essayons toujours d’intervenir avant. Parce qu’une fois que l’Etat intervient, les animaux s’en vont, et l’éleveur se retrouve seul. »
Vendre au juste prix, levier majeur
David Rivière a également récemment interpellé la députée iséroise (LREM) Cendra Motin, membre de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur la question des prix et donc de la rémunération des agriculteurs. Car « c’est d’abord ce qui nous prend à la gorge. Nous l’avons vu pendant le confinement, nous avons baissé de 78 % les importations de viande bovine, diffusées majoritairement dans la restauration hors domicile et les cantines. »
« Que s’est-il passé ? Les vaches charolaises standards ont pris 40 centimes de plus. Donc on est capable de le faire en France. Mais pour cela, il ne faut plus que les matières premières françaises, comme le bœuf ou le blé, deviennent des monnaies d’échange pour exporter des avions ou des voitures. Nous n’avons pas besoin de soja brésilien. Il va donc falloir aller au-delà, et taxer les produits d’importation de matière première. Parce que quoi qu’on en dise, le prix est l’un des premiers leviers à activer face au malaise des agriculteurs. »
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