Les éleveurs allaitants sont toujours confrontés à l’obligation de vendre leurs broutards en perdant de l’argent. L’appel à retenir les animaux dans les fermes lancé par le Berceau des races allaitantes du Massif central et la réunion des syndicats et des opérateurs commerciaux lors de la visite de ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, dans le Puy-de-Dôme le vendredi 16 octobre 2020 n’y ont rien changé.

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Entre colère et des doutes sur l’avenir

Parmi ces éleveurs, Romain Hérault est associé à ses parents et à son frère. Sur leur exploitation de 250 ha de prairies à 1 050 m d’altitude à Marcenat (Cantal), ils possèdent un double troupeau de 90 vaches laitières et 80 vaches allaitantes (60 salers et 20 aubracs). « J’ai vendu les cinq derniers broutards croisés salers-charolais de 420 kg le 15 octobre à 2,32 € par kilo vif contre 2,66 € l’an passé, constate Romain. Le décrochage des cours a été encore plus important sur les mâles salers purs vendus en septembre entre 2,05 et 2,13 €/kg. Un comble pour une race élevée au cœur de son berceau. »

Romain Hérault ne cache pas sa colère et ses doutes quant à l’avenir de la production qu’il a développée avec conviction depuis son installation en 2012. « Avec quatre sécheresses consécutives, des invasions de rats taupiers et des cours en baisse, c’est compliqué. Les annuités tombent et toutes nos charges augmentent. En tenant compte de mon coût de revient, il faudrait que je vende mes broutards à 1 400 € par tête. Cherchez l’erreur ! »

La qualité morphologique et sanitaire des animaux est pourtant au rendez-vous. Les produits issus du croisement des aubracs avec un taureau piémontais ont été vendus entre 2,44 € et 2,74 €/kg vif, une valorisation qui fait réfléchir le jeune éleveur à développer cette production.

« Je n’ai pas la place de garder des broutards »

Les ventes de l’année ne satisfont pas non plus Alain Joncoux, qui élève 55 vaches salers inscrites à Saint-Hippolyte (Cantal, 1 000 m d’altitude). « J’ai vendu des broutards de 400 kg à 2,11 €/kg vif au début d’octobre. Je n’ai pas fait de regain, il a fallu affourager à la montagne. Je n’ai pas la place de garder des broutards alors que les vaches vont vêler en décembre », déplore-t-il.

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Les départements de plaine n’échappent pas à la crise actuelle. Dans l’Allier, où les stocks fourragers sont fortement pénalisés par la sécheresse estivale, Jeunes Agriculteurs n’a pas suivi l’appel à retenir les broutards en ferme. « Nous devons trouver des solutions à long terme sur l’intégralité de la filière du bovin mâle français », précise Cédric Fournier, le président de JA de l’Allier.

Monique Roque Marmeys