Les sénateurs ont voté ce 27 novembre 2020 contre la révision à la baisse des tarifs d’achat de l’électricité de certains parcs photovoltaïques prévue par le projet de loi de finances pour 2021. Cette baisse découlait d’un amendement gouvernemental déposé à la dernière minute et adopté il y a deux semaines par l’Assemblée nationale.
Le Sénat a donc supprimé hier l’article 54 qui révisait à la baisse le tarif d’achat de l’électricité photovoltaïque produite par les installations d’une puissance supérieure à 250 kWc pour les contrats conclus entre 2006 et 2011.
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Les arguments du gouvernement loin de convaincre
Les arguments de Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de Barbara Pompili, n’ont pas convaincu les sénateurs lors des débats sur le projet de loi de finances pour 2021.
« Les 235 000 contrats souscrits entre 2006 et 2010 concentrent le tiers du soutien public aux énergies renouvelables, pour moins de 1 % de la production d’électricité », a argumenté Bérangère Abba, devant les sénateurs.
« Le gouvernement cible les installations de plus de 250 kilowatts, soit 0,5 % des 235 000 contrats, a-t-elle poursuivi. Ce sont ceux qui bénéficient d’une rémunération excessive, financée par le contribuable. »
« Des agriculteurs ont pris des risques »
Comme Philippe Bonnecarrère, sénateur du groupe Union Centriste, Franck Montaugé, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, a défendu le cas des agriculteurs qui ont investi dans des installations photovoltaïques.
« Dans des territoires ruraux en difficulté, aux sols peu riches, où les rendements sont faibles, des agriculteurs ont pris des risques pour s’en sortir, notamment en s’équipant en photovoltaïque, a-t-il rappelé. Je ne comprends pas que l’on remette ainsi brutalement en cause la viabilité de leur exploitation. Pour certains, il en va de leur vie ! »
Les contre-arguments s’empilent
Les sénateurs présents dans l’Hémicycle face à Bérangère Abba, ont aussi pointé du doigt le risque que cet article 54 entame un peu plus la défiance des Français vis-à-vis d’un État qui ne respecterait pas les engagements qu’il a pris.
« Cet article pose en réalité la question de la parole de l’État, en ces temps où la confiance est au plus bas, a argumenté Daniel Gremillet, sénateur du groupe Les Républicains (LR). Or pour l’innovation, la prise de risque, il faut de la confiance. Cet article est terrible. »
Cet article pose en réalité la question de la parole de l’ÉtatDaniel Gremillet, sénateur, Les Républicains
La sénatrice Christine Lavarde (LR) a enfoncé le clou, doutant de la somme de 2 milliards d’euros mise en avant par le gouvernement pour justifier son amendement. Ce dernier cible les contrats pour une puissance installée supérieure à 250 kWc.
Un calcul budgétaire à revoir
« Ils sont 850 en métropole, 150 dans les DOM, a-t-elle estimé. Pour la métropole, cela représente une économie potentielle sur les charges de service public de 737 millions d’euros. On est loin des 2 milliards ! »
« Les tarifs, la Commission de régulation de l’énergie l’a dit, étaient trop chers au regard du risque industriel, a-t-elle poursuivi. Mais vous pénalisez les exploitants qui n’étaient pas les contractants à l’époque ! »
« Il y a un risque de fragiliser le tissu de producteurs d’énergies renouvelables. Qui peut nous assurer que vous n’allez pas, demain, viser les installations dans les zones non interconnectées et d’une puissance inférieure à 250 kilowatts ? »
Il y a un risque de fragiliser le tissu de producteurs d’énergies renouvelablesChristine Lavarde, sénatrice, Les Républicains
« La concertation a été menée avec la filière, a répondu Bérangère Abba, la secrétaire d’État. De plus, une clause de sauvegarde limitera l’impact économique. » Un argument qui est loin de convaincre.
Une clause de sauvegarde qui ne convainc personne
« Les bras m’en tombent ! a répondu Sophie Primas (LR), sénatrice et présidente de la commission des affaires économiques du Sénat. La clause de sauvegarde, c’est à la tête du client ! Il y a un principe d’égalité, de respect de la parole de l’État. Les investisseurs ont pris des risques. Supprimons cet article au plus vite. »
« Les bras m’en tombent aussi, a ajouté Guy Benarroche, sénateur du groupe Écologiste, Solidarité et Territoires. Un amendement gouvernemental de dernière minute, sans étude d’impact, sans examen du Conseil d’État, une totale imprécision sur les contrats concernés… »
« Quel message adressez-vous aux acteurs de la filière ? Qu’est-ce qu’une rémunération « raisonnable » des capitaux ? Jeune parlementaire, je commence à me méfier des précisions qu’on apporte par décret, après le vote. »
Le vote des sénateurs a débouché sur la suppression de cet article 54 qui remettait en cause les tarifs accordés à certaines installations photovoltaïques datant d’avant 2011. Le texte va poursuivre son chemin avant son adoption définitive. Prochaine étape : la commission mixte paritaire.
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