Durant quatre jours, des fêtards ont saccagé la prairie de Didier Agrinier. Cet agriculteur d’Hures-la-Parade, en Lozère, se dit « révolté » face aux dégâts causés par cette rave party sauvage.
Le samedi 8 août 2020, quelque 7 000 personnes, y compris des enfants en bas âge, ont dansé au rythme d’une sono arrivée sur une semi-remorque.Le 8 août 2020, aux alentours de 23 h, près de 7 000 personnes et des milliers de véhiculestraversaient le village d’Hures-la-Parade, en Lozère, sous les yeux interloqués des riverains impuissants. Deux heures plus tard, au petit matin, le convoi avait pris place dans la prairie de Didier Agrinier.
« C’est immonde, une honte ! réagit l’agriculteur en colère auprès de La France Agricole. Je suis père de famille, j’ai deux filles, je ne comprends pas que des gamines se retrouvent dans un tel bordel, avec des petits de 3 ou 4 ans, à moitié drogués. » Didier Agrinier n’en revient pas. Sa prairie a été totalement saccagée en l’espace de quatre jours. « Ils sont tellement dans leur monde, ils ne savent même plus ce qu’ils font », poursuit-il au sujet des fêtards.
« On va refaire les clôtures, tout est cassé, ça coûte cher »
Plus d’une semaine après la fin de la rave party sur ce causse de Méjean, situé dans le Parc des Cévennes, le propriétaire de la pâture déplore l’étendue des dégâts : « C’est un peu sale, ils ont laissé des canapés, des chaises, il y a des tables, c’est incroyable ! »
Une opération de nettoyage par les services de l’État débute ce lundi 17 août 2020. « Ils vont tout nettoyer », mais « on va refaire les clôtures, tout est cassé, ça coûte cher, il faut tout racheter », constate Didier Agrinier. « Sur 90 hectares, ils m’ont souillé 30 hectares, on ne peut pas faire pâturer les brebis et prendre le risque que le lait pour nos fromages » soit infecté par les détritus laissés sur place. « On se bat bec et ongles pour la région et là ils saccagent tout. Ça me révolte ! ». Quant à l’avenir, « il faut attendre un an, on verra en 2021 », poursuit-il.
La préfecture « savait » selon la Coordination rurale
Un constat que déplore également la Coordination rurale (CR) de Lozère qui tient pour seul responsable l’État. Dans un communiqué de presse daté du 14 août 2020, le syndicat accuse les « fautes lourdes et manquements commis par les services de l’État », affirmant que ce dernier « a failli dans sa gestion du “Teknival” ».
Selon Alain Pouget, le président de la Coordination rurale de Lozère contacté par La France Agricole, « ils ont eu des éléments, ils auraient pu, ils n’ont pas fait. » Il appuie son accusation par le fait que la préfecture avait en sa possession des rapports qui annonçaient la tenue de cette rave party et qu’elle aurait ainsi pu anticiper les festivités.
En conséquence, la demande est simple. « Au regard de ces faits totalement inacceptables », le syndicat demande au Premier ministre Jean Castex, « d’examiner la possibilité de procéder à la mutation dans une autre affectation du préfet de la Lozère ».
« Je trouve ça inadmissible, ce n’est pas normal ! »
« Les Jeunes agriculteurs (JA) et la Fédération se sont bien débrouillés », réagit de son côté Didier Agrinier. Quant à la préfète accusée par la Coordination rurale, « elle s’est bougée, je n’ai rien à redire », affirme-t-il encore. Selon lui, les gendarmes, la préfecture, les JA et la Chambre d’agriculture se sont tous dévoués pour minimiser les dégâts et lui porter secours.
Il soutient la décision de ne pas avoir délogé de force les quelque 7 000 fêtards de sa parcelle en raison des risques liés à leur état d’ivresse notamment, pouvant ainsi « créer des accidents de voiture et tuer des familles de touristes sur le retour ».
« Ils me soûlent, ils ont raconté tout un tas de conneries à mon sujet »Didier Agrinier, agriculteur, au sujet des déclarations de la Coordination rurale de Lozère
Didier Agrinier se désolidarise de la demande de la coordination rurale, et, plus encore, il fustige l’action qu’il a menée lundi 10 août dernier pour réclamer l’évacuation immédiate des lieux. « Cette action je n’étais pas bien d’accord, ils sont allés bloquer la route, ça ne sert à rien et dérange le voisinage qui n’y est pour rien. Je trouve ça inadmissible, ce n’est pas normal ! » Et d’ajouter en colère, « ils me soûlent, ils ont raconté tout un tas de conneries à mon sujet, comme quoi j’aurais été à l’initiative [de cette action syndicale], c’est n’importe quoi ! ».
Les Jeunes agriculteurs et la FNSEA se désolidarisent
Une colère partagée par le président des Jeunes agriculteurs de Lozère. S’il dénonçait lundi l’inaction de l’État et demandait le « gazage massif » des fêtards, Vincent Bonnet s’est ravisé. Ayant suivi de près tout le déroulement des opérations de la préfecture et enchaîné les réunions avec la préfète, il assure désormais à La France Agricole que certes « on aurait préféré que ça se fasse plus rapidement, mais la préfète a essayé, avec les moyens qu’elle avait, de contenir et de contrôler. ».
« On ne s’associe pas du tout à cette demande », « il y a beaucoup de facteurs, comme la présence de femmes, d’enfants et de bébés, pour lesquels les autorités n’ont pas pu évacuer plus rapidement », précise-t-il.
De son côté, la FNSEA qui n’a pas pour habitude de commenter les actions de la Coordination rurale, affirme ne pas s’associer à cette demande. Selon Étienne Gangneron, vice-président de la FNSEA, « les services de la préfecture sont souvent en difficultés car c’est très difficile à gérer, il faut éviter les drames humains et assumer le maximum de sécurité civile. »
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