Les flux observés sur les deux premiers mois de la campagne montrent en effet des volumes d’exportation conséquents au départ des principales origines de l’hémisphère nord. Les chargements au départ de la mer Noire, qui étaient en baisse par rapport à la campagne passée sur le mois de juillet, devraient rattraper leur retard en août.

Au départ de l’Amérique du Nord, les chargements des USA et du Canada affichent une augmentation par rapport à la campagne passée depuis le début de la campagne. Ces éléments ne parviennent pas totalement à compenser la forte baisse des exportations au départ de l’UE. Néanmoins, ils témoignent d’une demande vigoureuse.

Les exportations de blé de l’UE sont en effet observées en recul de pratiquement 40 % d’une campagne sur l’autre sur la période allant de juillet à la mi-août. Cette chute est due à la baisse des récoltes et à une rétention des producteurs dans le sud-est de l’UE ainsi qu’à une faible compétitivité des blés français sur la scène internationale.

Ainsi, alors que le risque d’effondrement de la demande annoncé jusqu’à peu par certains opérateurs en raison de la crise sanitaire s’estompe, les producteurs réfractaires pratiquant la rétention continuent de garder la main.

En mer Noire, ces producteurs bénéficient de nouveaux arguments cette semaine alors que l’origine russe a remporté pour près de 0,8 million de tonnes d’appel d’offres ces derniers jours. En effet, le blé russe a remporté la totalité des derniers appels d’offres de l’Égypte et de la Turquie pour des volumes de respectivement 530 000 et 255 000 tonnes à charger en septembre et octobre.

Le blé russe toujours leader

Le blé russe réaffirme donc sa position de leader mondial en ce début de campagne après une campagne 2019/20 marquée par un retour en force des blés européens sur la scène internationale.

Pendant ce temps, les blés français peinent à trouver des débouchés conséquents à l’export en dehors de la Chine et de l’Algérie en raison d’une faible compétitivité, qui est en outre accentuée par un eurofort. Les exportations françaises vers les tiers s’affichent en recul de près 40 % depuis le début de campagne, à l’image des exportations totales de l’UE.

Cela n’a toutefois rien d’étonnant au regard de la faible récolte française (29,5 millions de tonnes contre 39,6 en 2019), qui devrait selon nos prévisions entraîner une chute de près de 50 % des flux vers les tiers sur l’ensemble de la campagne 2020/21 si ce faible niveau de compétitivité est maintenu.

À lire aussi : Exportations — Le blé français séduit la Chine (26/08/2020)

L’orge soutenue sur le rapproché

Comme pour le blé, les prix de l’orge s’affichent de nouveau en hausse cette semaine à 170,5 €/t rendu Rouen sur août-septembre (base juillet), une augmentation de 6 €/t par rapport au niveau de la semaine dernière.

La progression est donc prononcée pour les échéances rapprochées mais elle est plus modeste (à 166,25 €/t seulement) pour la période octobre-décembre. Cela illustre encore la demande chinoise qui tire les prix avec plus de 120 000 tonnes d’orge en train de charger vers la Chine entre le 27 août et le 4 septembre dans les ports français.

Les perspectives d’exportations vers cette destination vont ralentir cet automne au profit des chargements ukrainiens puis probablement argentins ce qui explique le décompte des prix éloignés sur le marché français.

Sur le marché mondial, la Tunisie a acheté cette semaine 75 000 tonnes d’orge fourragère pour chargement octobre à un prix moyen de 208 $/t Caf (arrivée à destination) et la Turquie a acheté 60 000 tonnes pour chargement entre le 11 et le 25 septembre à 197,8 $/t Caf. Ces niveaux de prix indiquent que les origines retenues ne seront pas françaises, les orges françaises valant, au départ de Rouen, quasiment le même prix que la valeur Caf (arrivée destination) payée par la Tunisie et plus que le prix à l’arrivée payé par la Turquie.

Bien que cela n’ait pas d’impact à court terme sur le marché, il est intéressant de souligner les investissements portuaires en cours dans la mer Rouge, menés par l’Arabie saoudite via un partenariat entre la compagnie nationale de transport maritime (Bahri) et le fonds d’investissement en agriculture et élevage Salic. Ces investissements ont pour but de développer les échanges et le stockage entre les pays exportateurs (Europe, mer Noire, Amérique du Sud) et la région de la mer Rouge et souligne l’importance que va garder cette région pour le commerce mondial de l’orge.

Du côté des récoltes, le ministère de l’agriculture allemand vient confirmer cette semaine une baisse de la production allemande à 10,9 millions de tonnes, un ordre de grandeur en ligne avec ce que nous attendons (-0,6 millions de tonnes par rapport à l’an dernier).

En orge de brasserie, les cotations se sont au contraire légèrement affaissées, abandonnant 1 €/t à 171 €/t pour les orges d’hiver et 173 €/t pour les orges de printemps Fob Creil (base juillet). Le ralentissement des chargements portuaires d’une part et les excédents en vue pour les orges de printemps d’autre part viennent peser sur les prix. La hausse de l’euro pesant aussi sur les cotations.

Retour à zéro du droit à l’import en maïs

Le droit qui s’applique sur les maïs importés dans l’UE en provenance des pays tiers est redescendu à zéro cette semaine. Cela découle de la forte hausse des prix du maïs US, qui sert de référence pour le calcul du droit à l’import dans l’UE.

Les prix US ont gagné 7 $/t cette semaine, poussés par plusieurs facteurs : le maintien d’une incertitude concernant l’ampleur des dégâts de la tempête Derecho dans l’IOWA, les dérèglements logistiques momentanés entraînés par la nouvelle tempête Laura jeudi dans le sud des USA, et la poursuite d’achats de maïs conséquents par la Chine (achat de 747 000 tonnes hier). Ce pays continue aussi d’acheter du soja US et la hausse du soja, comme celle du pétrole d’ailleurs suite à la tempête récente, poussent le maïs vers le haut.

Le Brésil est venu rajouter sa note haussière cette semaine en annonçant qu’il allait supprimer le droit d’importation du maïs face à la hausse des prix locauxEn Ukraine, les perspectives de rendement se dégradent à cause de la sécheresse qui a sévi dans le sud et le centre du pays, comme en Roumanie et en France où la récolte sera plus proche des 14 millions de tonnes que des 15 millions que l’on pouvait attendre encore tout début juillet.

Les prix français augmentent cette semaine sous l’effet des facteurs décrits ci-dessus. Néanmoins leur progression reste modeste pour les valeurs de la nouvelle récolte : + 1 €/t Fob Rhin à 167 €/t et +2 €/t Fob Bordeaux à 169,25 €/t. Le retour à zéro du droit d’importation apparaît favorable aux approvisionnements en provenance des pays tiers même s’il convient de souligner que les prix du maïs US restent dans une région où le droit pourrait être réactivé rapidement.

En effet, malgré les déboires récents, les perspectives de rendement sont encore bonneschez le géant de la production de maïs et le bilan mondial demeure très lourd, malgré les dégradations en Ukraine et en Europe. La révision en hausse de la récolte mondiale de maïs par le CIC (Conseil international des céréales) est venue le rappeler en cette fin de semaine.

Forte hausse pour les cours du soja

Cette semaine, le soja voit son prix fortement rebondir sous l’effet conjugué d’une météo capricieuse dans le Midwest américain et d’un déficit qui se creuse inéluctablement au Brésil suite à une forte demande chinoise.

L’état des cultures s’est déjà dégradé la semaine dernière avec un taux de champs notés bons à excellents ayant chuté de 3 points durant la semaine se terminant le 23 août, à 69 %. Dans le centre des États-Unis, entre le 24 et le 27 août, le temps a, de plus, été extrêmement sec. Cela a probablement affecté le nombre de gousses à l’hectare dans ces zones. Enfin, les modèles météorologiques annoncent un déficit de précipitations au cœur du Midwest américain sur les 15 prochains jours, alors que le soja rentre dans une phase clef du remplissage.

Cela a suffi à faire flamber les prix sur le marché de Chicago, qui retrouvent les niveaux les plus hauts atteints durant l’hiver 2019-2020. Le prix du soja à Chicago est maintenant coté à 346 $/t sur novembre (+13 $/t sur la semaine).

Le soja a également augmenté suite à l’annonce du gouvernement brésilien de baisser temporairement la taxe à l’importation habituellement imposée aux sojas en provenance des pays en dehors du Mercosur (ces derniers bénéficiant d’une exemption de droits à l’importation). Le marché brésilien du soja est en effet extrêmement tendu. Cela a par ailleurs forcé le gouvernement à réduire récemment le taux obligatoire d’incorporation du biodiesel de 2 points à seulement 10 % sur septembre-octobre.

En effet, les triturateurs brésiliens peinent à se fournir en fèves sur les prochains mois. La cause de ce manque de disponibilités est le fort appétit chinois pour le soja sud-américain. D’octobre à juillet, le Brésil a déjà exporté presque 63 millions de tonnes de fève vers la Chine en 2019/20, alors que les exportations brésiliennes vers le géant chinois s’élevaient à 59 millions de tonnes sur l’ensemble de la campagne 2018/19.

La demande chinoise en soja US pour des livraisons sur la nouvelle campagne (à partir d’octobre) est également dynamique et continue de soutenir les prix mondiaux. Les ventes de soja US à la Chine de la moisson 2020/21 s’élèvent déjà à 12,5 millions de tonnes au moins, contre des ventes totales de 15,3 millions de tonnes à ce jour pour la campagne en cours.

Les tourteaux suivent

Les cours du tourteau de soja sont également soutenus par ce contexte mondial haussier en soja. Le tourteau US gagne 1 $/t cette semaine à Chicago, le dynamisme de la production locale tempérant la hausse des prix. À Montoir, le prix du tourteau monte de 4 €/t cette semaine, soutenu par la hausse des cours des tourteaux de soja sud-américains.

Le prix du pois fourrager voit son prix reculer malgré tout cette semaine, celui-ci étant pénalisé par son manque de compétitivité dans les aliments composés, surtout vis-à-vis du tourteau de soja.

Embellie pour le colza français

Le complexe soja entraîne les prix mondiaux du colza à la hausse cette semaine. C’est particulièrement vrai pour le canola canadien, dont le prix nouvelle campagne rebondit de 15 $/t (livraison novembre 2020) par rapport à la semaine dernière.

La progression du prix du colza dans les prairies canadiennes (en dollar US) a été renforcée par une hausse de la valeur du dollar canadien par rapport au dollar US. Pour l’instant, les canolas semblent prometteurs selon les observateurs locaux, mais le temps chaud et sec des dernières semaines pourrait avoir réduit un peu le potentiel des cultures les plus tardives. La récolte démarre tout juste, avec 2 % des surfaces récoltées au 24 août dans les provinces de Saskatchewan et de Manitoba.

En France, le prix des colzas bénéficie de cette conjoncture mondiale haussière et bondit de 11,5 €/t à Rouen cette semaine. Les prix sur le marché à terme augmentent de 5 €/t pour les échéances novembre et février. Le temps a été globalement très sec en août sur une grande partie de l’Union Européenne, ce qui pourrait pénaliser les semis de colza de la prochaine récolte. C’est aussi le cas en Ukraine. Cela soutient également les prix.

Enfin, le petit rebond du cours du pétrole en raison des tempêtes et ouragans ayant touché le golfe du Mexique cette semaine, ainsi que la demande dynamique en huile du secteur biodiesel, ont soutenu le prix de l’huile de colza. Les obligations d’incorporations de l’année 2020 obligent en effet les distributeurs de carburants à augmenter leurs achats de biodiesel, même si l’usage de la voiture par les Européens peine à retrouver les niveaux de l’avant-Covid.

Prix du tournesol standard en baisse

Le prix du tournesol à Saint-Nazaire affiche un recul de 10 €/t à 340 €/t cette semaine. Les cours de la qualité oléique sont inchangés, à 350 €/t. Les quelques pluies dans le Sud-Ouest, la Bourgogne, et le centre ces derniers jours ont apporté un peu de répit aux cultures. Par ailleurs, la récolte vient de démarrer en mer Noire. Les premiers retours sont mitigés, avec des rendements assez faibles en Ukraine, mais meilleurs que l’an passé en Russie. Toutefois la moisson de tournesol ne devrait battre son plein qu’en septembre.

Tallage

À suivre : comportement de la Chine aux achats, récolte russe de blé, parité euro/dollar, prix du pétrole, conditions de fin de cycle pour le maïs, le colza et le soja dans l’hémisphère nord, avancée des récoltes de colza et de tournesol (Europe, mer Noire), poursuite ou non de la sécheresse en Argentine

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