Le départ de Frans Timmermans de la Commission européenne qui avait la responsabilité du pacte vert, aura eu le mérite de faire quelques heureux. Et Christiane Lambert, la présidente du Copa, syndicat des producteurs européens, en fait partie. « Monsieur Timmermans ou d’autres commissaires ont voulu aller trop vite et passer en force en disant : “Vous allez voir ce que vous allez voir, vous les agriculteurs, on va vous dire ce qu’il faut faire.” Ça a été un problème de méthode ici », a-t-elle jugé devant la presse ce vendredi 6 octobre 2023. Ce n’est donc pas surprenant, beaucoup des dossiers scrutés en cette rentrée découlent du pacte vert dont Frans Timmermans avait la charge.
Pas d’étude d’impact
Comme un fil rouge de la conférence de presse, Christiane Lambert a insisté sur le manque de considération des conséquences induites par les différents textes concernant l’agriculture. « Nous avons souvent regretté qu’il n’y ait pas d’étude d’impact sur les différentes propositions qui ont été faites, y compris pour évaluer l’impact de l’ensemble des textes », regrette la présidente du Copa.
Le règlement sur la réduction de l’usage de produits phytosanitaires (SUR) qui se confronte à différents votes au cours des prochaines semaines, a fait office d’exemple pour l’ancienne présidente de la FNSEA. « Nous comprenons la nécessité d’améliorer l’usage des produits phytosanitaires, de diminuer les impacts sur l’environnement, la biodiversité, l’eau, mais il ne faut pas laisser les agriculteurs sans solution, a répété Christiane Lambert. Le processus d’approbation des solutions de rechange doit aller plus vite. Là aussi c’est : pas d’interdiction sans solution. »
« Nous demandons de la clarté »
La question de l’utilisation des produits phytosanitaires dans les zones sensibles reste problématique pour le Copa, notamment par le manque de clarté sur ce que cela implique sur le terrain. Une occasion pour sa présidente d’en remettre une couche sur l’ancien commissaire à l’Environnement. « Sur ce sujet à la commission environnementale, il y a des expressions qui vont beaucoup trop loin, qui ne sont pas réalistes et qui ne sont pas connectées à la réalité agronomique ou biologique », a-t-elle conclu.
Christiane Lambert a ensuite rappelé tout le bien que son syndicat pense des nouvelles technologies génomiques (NGT), non sans glisser un nouveau tacle aux autorités européennes. « Beaucoup de pays dans le monde sont déjà en train de revoir la réglementation pour donner au sélectionneur l’accès à ces techniques et l’Europe ne peut pas elle, se mettre en marge, sinon nous importerons des produits obtenus à partir de NGT », avertit-elle.
Le calendrier électoral en métronome
« Certains voudraient accélérer un certain nombre de décisions pour prendre le maximum avant le changement de commission. Pour nous, il y a un risque de surchauffe », a averti Christiane Lambert. Avec les élections européennes qui approchent (les 6 et 9 juin prochains) et le renouvellement de la Commission dans la foulée, la présidente du Copa a voulu rappeler sa vigilance.
Sa vigilance et ses arguments pour faire infléchir une politique résolument plus verte, mais décidée avant le Covid et l’invasion russe en Ukraine. « Le Green Deal n’a pas été ajusté malgré ces deux évènements », estime Christiane Lambert, avant d’ajouter les différents épisodes climatiques de ces derniers mois à la liste des éléments perturbateurs de la production agricole européenne. Un regret pour la présidente, le non-renouvellement des dérogations pour les jachères. « Nous avons souhaité que les dérogations qui avaient été mises en œuvre sur les deux années précédentes puissent être reconduites, sujet sur lequel nous n’avons pas eu de réponse pour l’instant. Les ministres le demandent mais le commissaire n’écoute pas », a-t-elle tranché, visant cette fois le commissaire à l’Agriculture, Janusz Wojciechowski.
Si l’ambiance n’était pas à la distribution de bonnes notes, le Copa-Cogeca a tout de même admis sa satisfaction sur l’un des gros dossiers agricoles, celui de la restauration de la nature. « La nouvelle version de la loi qui a été proposée a amené du réalisme », admet Christiane Lambert. La présidente réclame toutefois des moyens, pour que les agriculteurs atteignent les objectifs demandés avec la création d’un fonds spécifique. « Les agriculteurs ne peuvent pas porter sur leurs propres épaules la restauration de la nature ou de la biodiversité qui est un bien commun pour l’ensemble de l’opinion. Ça ne peut pas être fait sur nos propres deniers », a-t-elle appuyé.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire