LA FRANCE AGRICOLE
Au Gaec des Landelles, la stabulation est équipée de logettes climatisées, avec des matelas à eau. Elles offrent un niveau de confort élevé aux animaux. La chaleur récupérée chauffe l’eau de l’élevage.
Immense et silencieux, au milieu des champs, ce bâtiment a quelque chose d’une cathédrale… en version agricole. Il s’agit d’une stabulation de plus de 3 600 m², occupée par 170 vaches laitières. C’est ici que se trouve la première installation en France de logettes climatisées. Elles sont équipées des matelas à eau Aquaclim produits par Bioret Agri.
Hausse de production
Amélie Courcoul a rejoint, en 2018, le Gaec des Landelles, à Guémené-Penfao (Loire-Atlantique), lors de la fusion de trois exploitations laitières, dont la sienne. « Ici, le site est central par rapport aux trois fermes, mais il n’y a que 11 hectares accessibles, et nous sommes passés à la traite robotisée », explique Amélie. Le troupeau laitier ne peut donc pas sortir pâturer, alors que les trois élevages avaient auparavant accès à l’extérieur. De ce fait, le confort maximal des animaux a été un critère déterminant lors de la conception du bâtiment, sorti de terre il y a dix-huit mois. Le choix d’investir dans des logettes avec matelas à eau s’est vite imposé, l’absence de point de pression favorisant le bien-être des vaches. Bioret Agri, basé à 30 km de l’exploitation, a proposé d’installer son nouveau modèle de matelas à eau, l’Aquaclim Thermodynamic. Celui-ci promet de réduire les effets des fortes températures.
La réduction du stress thermique est un enjeu zootechnique qui va devenir de plus en plus important, à mesure que le climat évolue. Chaque été, les pics de chaleur affectent le bien-être, la santé, donc la production des vaches. Ces dernières sont en situation de stress thermique dès que la température dépasse 23 à 26 °C, selon l’humidité relative de l’air. Ces conditions de stress, de plusieurs heures par jour en été, sont observées dans de nombreuses régions de France. Les organismes des animaux sont mis à rude épreuve et les volumes de lait produits chutent parfois de plusieurs kilos par jour.
Au Gaec des Landelles, le matelas thermodynamique a rapidement fait ses preuves. Le bâtiment est entré en fonctionnement à la fin du mois de mars 2019. Plusieurs pics de chaleurs ont rythmé l’été. « Nous recevions des messages d’alerte des coopératives et des nutritionnistes régulièrement, se rappelle Amélie. De nombreux élevages de la région ont vu des niveaux de production de lait qui baissaient de 3 à 5 kg par vache et par jour, pendant des périodes de plusieurs jours. Nous avons eu seulement deux jours avec une baisse inférieure à 1,5 kg par vache et par jour. Le taux d’occupation des logettes était très élevé. »
De la « zoothermie »
L’effet climatisant repose sur la circulation d’eau à travers des canules qui traversent les matelas. La pression du liquide qui y circule est de 0,6 bar, pour éviter un effet « barres de bois » qui serait inconfortable. L’eau rafraîchit la logette en récupérant des calories thermiques aux bovins. Puis une pompe à chaleur transfère cette énergie à une autre canalisation. Cette eau préchauffée est utilisée par les robots de traite, limitant les besoins énergétiques pour la chaleur sanitaire.
Bioret Agri a déposé le terme de « zoothermie » pour décrire son concept de chauffage par les animaux. L’écart de température entre la source et l’eau sortant des canules dépend de la température extérieure et du taux d’occupation des logettes. « En moyenne, elle rentre aux alentours de 12 °C et ressort à environ 19 °C, relève l’éleveuse, c’est déjà une économie d’énergie. » Amélie assure que le dispositif pourrait chauffer un volume d’eau bien plus important. « Nous pourrions bénéficier d’une piscine chauffée sur l’élevage », plaisante-t-elle.
D’après Bioret agri, le métabolisme d’une vache laitière correspond à une puissance de 1 500 à 1 700 W. La technologie Aquaclim en extrait 200. L’entreprise affirme que pour un troupeau de 170 animaux, la puissance thermique atteint 30 kW en hiver et 45 kW en été.
Des projets sont à l’étude pour installer le dispositif sur des élevages avec une unité de méthanisation. La chaleur récupérée servirait alors à réchauffer la cuve du digesteur, pour améliorer l’efficacité de la fermentation et optimiser la production d’énergie.
350 euros par place
Les matelas Aquaclim coûtent 350 euros par place, contre 250 euros pour les matelas à eau classiques. Il faut y rajouter quelques frais de plomberie pour acheminer l’eau. Au Gaec des Landelles, l’installation a été effectuée dans un bâtiment neuf, mais une adaptation sur de l’existant est possible. Les canalisations d’entrée et de sortie d’eau peuvent être aériennes ou souterraines, précise Bioret Agri.
Au-delà de la taille et du calme de la stabulation, c’est peut-être finalement la fraîcheur de l’édifice qui rappelle les cathédrales. À ceci près qu’on n’y change pas l’eau en vin, mais le stress thermique en économie d’énergie. Et que les assises y ont l’air bien plus confortables…
Contrer les grands froids