mercredi 9 juillet 2014

Recherche publique : un rôle essentiel pour démystifier les biotechnologies

Dans un monde où les biotechnologies, et les OGM en particulier, sont rejetés par nos sociétés où des avis divergent, rappelons-nous que toute opinion mérite  respect pour des débats sereins.
La sécurité alimentaire est un défi prioritaire parmi les grands enjeux du 21e siècle, et il est urgent que la recherche publique puisse y jouer pleinement son rôle.
     Les OGM  sont devenus des sujets épidermiques et manichéens, la recherche publique doit pouvoir, comme d’autres parties prenantes, tenir sa place pour éclairer les débats. Un des principaux arguments des détracteurs des biotechnologies étant « l’appropriation du vivant » par de grandes entreprises internationales à des fins lucratives, on peut se demander pourquoi les organisations de recherche publique sont également les cibles des opposants ? Des comportements extrêmes interpellent  celles et ceux qui s’investissent, en toute indépendance, pour inventorier les avantages et inconvénients de ces nouvelles technologies pour des accessions variétales, des itinéraires culturaux ou des impacts économiques.
Aujourd’hui en France, la recherche publique n’a plus les moyens de poursuivre ses travaux à l’extérieur des laboratoires, car elle a subi de nombreuses destructions d’essais depuis une vingtaine d’années. Le néo-statut de « faucheur volontaire » est d’ailleurs entré dans le langage courant. A ce jour, aucune expérimentation en plein champ n’est donc conduite dans notre pays sur des plantes transgéniques, alors que dans les années 1990, la France était le pays européen qui comptait le plus grand nombre d’essais. A l’échelle européenne, plus de 70 actions contre des expériences de recherche publique sur les plantes génétiquement modifiées ont été répertoriées. C’est également le cas hors d’Europe,  par exemple en août 2013, des essais de Riz Doré ont été détruits aux Philippines, soulevant l’indignation de la communauté scientifique internationale.
Ces sujets ont été abordés lors de l’agr’iDébat de notre think tank le 18 juin, intitulé « L’exemple du Riz Doré : la santé accessible à tous ? ». Comme nos différents intervenants l’ont souligné, ce riz, de couleur dorée car enrichi en beta-carotène par génie génétique, a été mis au point dans le cadre d’un vaste partenariat international entre recherche publique, recherche privée et organisations philanthropiques pour répondre à un grave problème de santé publique, la cécité, dans certains des pays les plus pauvres de la planète.
On est loin dans ce cas du contexte alimentaire et sanitaire de nos pays occidentaux, où la nourriture est abondante et variée, essentielle à notre bon état de santé, et où la production agricole est diversifiée et dispose de multiples moyens de production. Dans le cas du Riz Doré, il s’agit d’agriculture de subsistance, de quasi monoculture, et de régime alimentaire centré sur un aliment de base avec très peu de moyens de production. Si le problème de la malnutrition et de son impact sur la santé sont bien évidemment complexes et nécessitent un ensemble d’actions (et pas seulement d’ordre technique) pour être résolu, la consommation de Riz Doré par ces populations serait  probablement bénéfique. Ce riz innovant est un des outils qui semble sûr, efficace, abordable, et accessible parmi des alternatives peu nombreuses, chères et aux résultats souvent  décevants. Au-delà de la lourdeur des processus qui semblent ralentir l’autorisation de produire un tel riz, au-delà du discours de leurs inventeurs qui peut être par moment militant, au-delà des justes interrogations des consommateurs, on ne peut qu’être respectueux du travail de ces chercheurs qui ont su cheminer dans les mécanismes intimes du fonctionnement de cette plante pour en infléchir les caractéristiques et, par cet exemple, séduit par l’idée de biotechnologies au service de la santé mondiale.
Laissons la recherche faire son travail et mener à terme les études indispensables à son éventuelle commercialisation pour juger de ses résultats et donner aux populations concernées une chance de se sortir du cycle de la malnutrition et de la pauvreté.

Gérard Matheron, administrateur saf agr’iDées

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